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Publié : 26 janvier 2013

Manoeuvre des vannes pendant la période couverte par un arrêté préfectoral d’interdiction

M. Nicaudie - 13/8/2006

Conseil Juridique de précaution
Tout propriétaire de moulin devrait avoir un pluviomètre personnel et enregistrer les précipitations et les noter sur un agenda. Cette précaution a permis à des justiciables de persuader un Procureur de la République d’abandonner des poursuites tellement les procès verbaux des gardes-pêche étaient délirants au sujet d’une manœuvre de vanne en période de crue.
De même, en cas de harcèlement de la part d’un garde-pêche, il est judicieux de noter sur un agenda les manœuvres de vannes effectuées et leurs intensité et durée.
L’achat et la consultation du code de l’environnement DALLOZ ou LITEC sont conseillés.

Dans ce qui suit nous supposons qu’il s’agit d’un moulin situé sur un cours d’eau non domanial implanté antérieurement à la Révolution Française, soit 1789, avec une preuve : inscription sur les cartes de Cassini ou de Belleyme, géographes du Roi ,ou tout autre document prouvant l’antériorité de l’existence du moulin à cette date.
Pour les moulins situés sur un cours d’eau domanial qui appartenait au Roi de France, il faut avoir un titre ou une carte antérieure à l’édit de Moulins du 13 mai 1566.

Le droit d’eau d’un moulin fondé en titre ou sur titre (dans le cas assez rare où un document daté décrit la consistance du droit d’eau)

C’est un droit qui a la priorité sur tous les autres usages de l’eau et notamment la pêche. Cette affirmation n’a pour l’instant jamais été démentie par les tribunaux civils ou administratifs.
Il faut savoir que systématiquement les administrations concernées essaient de faire croire qu’elles ont tous les pouvoirs d’administration et d’interprétation des droits acquis d’autant plus qu’ils sont imprescriptibles.
Un droit d’eau consiste à pouvoir barrer un cours d’eau, ce qui a pour effet d’élever artificiellement le niveau de l’eau, puis de dériver ces eaux surélevées en profitant de la pente naturelle du terrain choisi soigneusement par un canal d’amenée en direction du moulin, pour ensuite rejeter ces eaux par un canal de fuite après les avoir utilisées pour faire tourner la roue, le rouet ou la turbine du moulin.

Conséquences de la détention d’un droit d’eau

Toutes les opérations liées à la vie ordinaire et normale du moulin et notamment les opérations d’entretien et de réparation des accessoires du moulin, découlent du droit d’eau et sont autorisées de plein droit. Cette affirmation est confirmée par tous les tribunaux si le procès a été bien instruit et mené. Le propriétaire d’un moulin n’a pas à demander quoi que ce soit pour réparer ou entretenir ses vannages ou sa maçonnerie. Le propriétaire d’un moulin à eau peut intervenir quand il le veut pour l’entretien de son moulin, c’est même un devoir d’avoir des vannages entretenus pour la sécurité des biens et des personnes. (par exemple pour que les pompiers puissent repêcher une voiture tombée dans le ruisseau en plein hiver et qui a dérivé contre le barrage tous phares allumés sous l’eau)

Cependant, les sécheresses exceptionnelles survenues depuis 1989, au regard des statistiques de pluviométrie de plus de cinquante années, font que l’intérêt général empiète sur le droit d’eau et permet au Préfet de publier ces fameux arrêtés d’interdiction de manœuvre des vannes du 15 juin au 15 octobre.
Il faut constater d’ailleurs qu’il y a une contradiction entre ces arrêtés et la politique systématique d’amoindrissement des droits d’eau voire leur disparition du ministère de l’environnement par le bras armé du Conseil Supérieur de la Pêche et du ministère de l’Agriculture par le bras armé des Chefs de Service de l’eau des DDAF dans les départements. Quand il fait si chaud et aussi longtemps et que les pluies ne viennent pas ou en quantité insuffisante, personne ne se plaint de la présence des réserves d’eau constituées par les barrages, seuils ou chaussées de nos moulins constituant un havre de paix et de survie pour la faune piscicole.

En cas d’intervention sur ce qui constitue la propriété du moulin au titre de l’article 546 du code civil (doit d’accession) : le bâtiment, le barrage, les canaux d’amenée et de fuite, il est donc conseillé de faire, s’il y a une interdiction préfectorale, une déclaration d’intention d’intervention et pas une demande d’autorisation inappropriée. En général cette lettre devrait recevoir une réponse rapide d’opposition s’il y a des raisons fondées pour l’administration. L’absence de réponse vaut consentement et le délai normal administratif de deux mois ne s’applique pas pour une déclaration d’intention urgente compte tenu des impératifs liés au climat et à l’intervention d’une entreprise extérieure éventuellement.
Il est conseillé également d’avertir ses voisins.
Dans le cas où les rapports sont normaux, il peut s’avérer habile de convoquer le garde-pêche du CSP et de l’informer de ce qui va se passer mais cette initiative est hasardeuse.
Les gardes-pêche des associations de pêche ou de la Fédération départementale de pêche n’ont aucun droit d’intervention sur les cours d’eau non domaniaux dans la mesure où le droit de pêche qui appartient au propriétaire riverain (article L 435-4 du code de l’environnement) n’a pas été cédé à une association de pêche. Leurs éventuels PV sont illégaux, ce qui ne les empêchent pas d’en dresser. Il ne faut surtout pas accepter de payer une amende forfaitaire.

L’intervention du propriétaire du moulin est liée à deux facteurs :
les conditions climatiques et le régime des eaux
la disponibilité d’une entreprise extérieure si elle est mandée par le propriétaire du moulin

Dans un département de l’Ouest de la France où les propriétaires de moulins sont mieux organisés et mieux informés de leurs droits, la dérogation permanente orale à l’arrêté annuel d’interdiction de manœuvre des vannes est reprise dans l’arrêté préfectoral. Les vannes sont ouvertes de quelques centimètres afin de laisser passer un peu d’eau et préserver ainsi la vie piscicole.

Mais c’est le résultat de dix années de procès et de résistance et de présence permanente dans les réunions officielles organisées par le Préfet qui a permis ce résultat. Les fonctionnaires savent que les principaux acteurs dans ce département connaissent le droit et qu’il est inutile d’essayer d’abuser les propriétaires de moulins sous peine de procès qu’ils vont perdre.

La règle générale observée est que les propriétaires de moulins à eau ne connaissent pas le droit des moulins et que les Chefs des Services de l’Eau des DDAF profitent de cette situation pour appliquer "leur droit".
Pour couronner le tout, les propriétaires aiment bien rester isolés et répugnent à rejoindre des associations ou au moins à se regrouper pour s’informer.

La règle générale à observer pour les moulins est le respect de la vie piscicole pour toute manœuvre afin de ne pas être répréhensible aux termes de l’article L 432-1 du code de l’environnement applicable en principe pour tous les titulaires d’un droit de pêche, donc tous les riverains des cours d’eau non domaniaux. (Le droit de pêche appartient à l’Etat sur les cours d’eau domaniaux, lequel est loué aux fédérations de pêche). Lorsque le meunier fait baisser le niveau de l’eau, il ne doit pas refermer brutalement sa vanne afin de préserver le débit réservé qui est du quart du dixième (1/40°) du module du cours d’eau pour les anciens moulins (article L 432-5 du code de l’environnement) Il est extrêmement rare d’avoir pour obligation d’assécher totalement un bief. C’est indispensable pour la réfection complète d’un barrage, ce qui est un évènement très rare. Dans la plupart des cas l’abaissement du niveau de l’eau permet les réparations nécessaires ou l’entretien des glissières et des vannes.

Il arrive de plus en plus fréquemment que les mois d’octobre ou novembre et pratiquement tout le reste de l’année sont propices pour une intervention sur un moulin tellement les conditions climatiques ont changé. C’est hasardeux, mais l’habileté consisterait d’attendre la fin de la période d’interdiction pour intervenir soit avant le mois de juin soit après le mois d’octobre.
De même, il n’est pas rare d’avoir à ouvrir les vannes de décharge en pleine période d’interdiction à cause d’un orage bienfaiteur.

Marc Nicaudie
"Le Fringant"
24100 Saint Laurent des Vignes
Tél. : 05 53 57 51 96
MARC.NICAUDIE@wanadoo.fr

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