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Publié : 1er mars 2013

Le bief appartient au moulin si le propriétaire prouve qu’il a été creusé de main d’homme (cass, 5 mai 1975)

Cour de Cassation, 5 mai 1975

SUR LE PREMIER MOYEN : ATTENDU QU’IMPUTANT AU BETAIL DES CONSORTS SELLE, EXPLOITANTS D’HERBAGES RIVERAINS DU CANAL DE DECHARGE DU MOULIN D’HOHERVILLE BATI SUR LA DURDENT, RIVIERE NON DOMANIALE, LA DETERIORATION DE LA BERGE NORD DE CE CANAL, DAME HAYS, PROPRIETAIRE DU MOULIN, A ASSIGNE LESDITS CONSORTS POUR FAIRE JUGER QU’ELLE EST PROPRIETAIRE EXCLUSIVE DU CANAL DE DECHARGE ET DE SES FRANCS BORDS, ET POUR OBTENIR L’ATTRIBUTION DE DOMMAGES-INTERETS ;

ATTENDU QU’IL EST FAIT GRIEF A L’ARRET ATTAQUE D’AVOIR DEBOUTE DAME HAYS DE SES PRETENTIONS, ALORS, SELON LE MOYEN, QUE, D’UNE PART, LA COUR D’APPEL AURAIT INTERVERTI LA CHARGE DE LA PREUVE EN IMPOSANT A LADITE DAME DE DEMONTRER QUE LE CANAL DE DECHARGE AVAIT ETE CONSTRUIT DE LA MAIN DE L’HOMME, CEPENDANT QUE, LE PROPRIETAIRE DU MOULIN BENEFICIANT D’UNE PRESOMPTION DE PROPRIETE DU CANAL, C’ETAIT AUX CONSORTS SELLE QU’IL INCOMBAIT, POUR DETRUIRE CETTE PRESOMPTION, DE DEMONTRER QUE LE CANAL CONSTITUAIT UN BRAS NATUREL DE LA DURDENT, ET QUE,

D’AUTRE PART, LA COUR D’APPEL N’A PU SANS SE CONTREDIRE ENTERINER LE RAPPORT DES EXPERTS ET DECIDER QUE DAME HAYS N’ETAIT PAS PROPRIETAIRE CAR ELLE NE RAPPORTAIT PAS LA PREUVE DE CE QUE LE BRAS LITIGIEUX AIT ETE CONSTRUIT DE LA MAIN DE L’HOMME, LES EXPERTS AYANT DECLARE DANS LEURS CONCLUSIONS QUE LA JURISPRUDENCE DE LA COUR DE CASSATION PERMET D’ETABLIR EN FAVEUR DE DAME HAYS, EN TANT QUE PROPRIETAIRE DU CANAL DE DECHARGE, EN SORTE QU’IL APPARTIENDRAIT AUX CONSORTS SELLE DE FAIRE LA PREUVE CONTRAIRE OU DE JUSTIFIER DE LEUR ACQUISITION, PAR PRESCRIPTION, D’UNE MOITIE DU BRAS LITIGIEUX ;

MAIS ATTENDU QUE CELUI QUI INVOQUE UNE PRESOMPTION LEGALE DOIT ETABLIR L’EXISTENCE DU FAIT D’OU LA LOI TIRE CETTE PRESOMPTION ;

QU’IL INCOMBAIT DONC A DAME HAYS DE PROUVER QUE LE CANAL LITIGIEUX AVAIT ETE CREE ARTIFICIELLEMENT POUR LE SERVICE DE SON MOULIN, LE LIT NATUREL D’UN COURS D’EAU, FUT-IL AMENAGE ET UTILISE COMME CANAL DE DECHARGE D’UN MOULIN, N’ETANT PAS, A LA DIFFERENCE DU CANAL CREUSE PAR L’HOMME, PRESUME APPARTENIR EXCLUSIVEMENT AU PROPRIETAIRE DE CE MOULIN ;

QU’AINSI, C’EST PAR UNE EXACTE APPLICATION DES REGLES DE LA PREUVE QU’APPRECIANT SOUVERAINEMENT LA VALEUR DES ELEMENTS QUI LUI ETAIENT SOUMIS, ET RELEVANT NOTAMMENT L’ASPECT DU CANAL, SON TRACE SINUEUX, AINSI QUE L’ABSENCE DE TOUTE MENTION DE SON CREUSEMENT, DANS LES DOCUMENTS RELATIFS A L’EDIFICATION DU MOULIN EN 1807, LA COUR D’APPEL A ESTIME QUE DAME HAYS N’AVAIT PAS RAPPORTE LA PREUVE DE LA CREATION ARTIFICIELLE DU CANAL PAR ELLE ALLEGUEE, A ENTERINE LE RAPPORT DES EXPERTS ET A DECIDE QUE "LE BRAS EN LITIGE, DIT CANAL DE DECHARGE, EST UN BRAS NATUREL" DE LA RIVIERE UTILISE COMME DECHARGE, ET QU’EN CONSEQUENCE DAME HAYS N’EN EST PAS LA PROPRIETAIRE EXCLUSIVE ;

ATTENDU, D’AUTRE PART, QUE LES JUGES D’APPEL, QUI N’ETAIENT PAS LIES PAR LES CONCLUSIONS DU RAPPORT D’EXPERTISE, NE SE SONT PAS CONTREDITS EN RETENANT LES CONSTATATIONS DES EXPERTS ETABLISSANT LE CARACTERE NATUREL DU BRAS DE RIVIERE UTILISE COMME CANAL DE DECHARGE DU MOULIN, TOUT EN ECARTANT LEURS APPRECIATIONS, EXCEDANT LE CADRE DE LEUR MISSION, RELATIVES A L’INCIDENCE, SUR LA PORTEE DE CES CONSTATATIONS, DE LA PRESOMPTION DE PROPRIETE RECONNUE A L’USINIER SUR LES CANAUX PERMETTANT LE FONCTIONNEMENT DE SON USINE ;

D’OU IL SUIT QUE LE MOYEN N’EST PAS FONDE ;

SUR LE SECOND MOYEN : ATTENDU QU’IL EST ENCORE REPROCHE A L’ARRET DE N’AVOIR PAS RECONNU A DAME HAYS LE BENEFICE DE LA PRESCRIPTION ACQUISITIVE, EN AFFIRMANT NOTAMMENT QUE LA POSSESSION NE POUVAIT S’ETABLIR A L’ORIGINE QUE PAR DES ACTES D’OCCUPATION REELLE, ALORS, SELON LE MOYEN, QUE SI D’UNE FACON GENERALE LA POSSESSION UTILE POUR POUVOIR PRESCRIRE UN IMMEUBLE SUPPOSE A L’ORIGINE DES ACTES D’OCCUPATION REELLE, IL EN EST AUTREMENT LORSQU’IL S’AGIT POUR UN RIVERAIN DE PRESCRIRE LA PROPRIETE DE L’AUTRE MOITIE DU LIT D’UNE RIVIERE NON DOMANIALE, LA POSSESSION EN CETTE MATIERE SUPPOSANT SEULEMENT DES ACTES DE CONTRADICTION FORMELLE AUX DROITS DU RIVERAIN D’EN FACE, ACTES QUI PERMETTENT A LEUR AUTEUR D’INVOQUER LA PRESCRIPTION TRENTENAIRE ;

MAIS ATTENDU QU’APRES AVOIR A BON DROIT ENONCE QUE LA POSSESSION NE PEUT CONDUIRE UTILEMENT A L’USUCAPION QU’AUTANT QU’ELLE PRESENTE LES DIVERS CARACTERES PREVUS A L’ARTICLE 2229 DU CODE CIVIL, LES JUGES D’APPEL, EN RAISON DES TRAVAUX APPARENTS ET PERMANENTS EFFECTUES PAR SES AUTEURS ET DE L’ASSECHEMENT QUASI TOTAL DU BRAS D’EAU QUI RESULTAIT AUTREFOIS DU FONCTIONNEMENT DU MOULIN, USUCAPE L’AUTRE MOITIE DE CE BRAS DE RIVIERE, DECLARENT QUE CES FAITS DE POSSESSION, CONTESTES PAR LES CONSORTS SELLE, SONT IMPRECIS, BEAUCOUP TROP LOINTAINS, NE CORRESPONDENT PAS AUX CONSTATATIONS DES EXPERTS ET N’ONT LAISSE AUCUNE TRACE DECISIVE ;

ATTENDU QU’ESTIMANT AINSI, DANS L’EXERCICE DE LEUR POUVOIR SOUVERAIN D’APPRECIATION, QUE LA PREUVE N’ETAIT PAS RAPPORTEE PAR DAME HAYS D’UNE POSSESSION UTILE AU SENS DE L’ARTICLE 2229 DU CODE CIVIL, LES JUGES DU SECOND DEGRE ONT, PAR CE SEUL MOTIF, LEGALEMENT JUSTIFIE LEUR DECISION ;
D’OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE PEUT ETRE ACCUEILLI ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L’ARRET RENDU LE 15 JANVIER 1974 PAR LA COUR D’APPEL DE ROUEN ;


résumé

CELUI QUI INVOQUE UNE PRESOMPTION LEGALE DOIT ETABLIR L’EXISTENCE DU FAIT D’OU LA LOI TIRE CETTE PRESOMPTION. IL INCOMBE DONC A LA PROPRIETAIRE D’UN MOULIN, BATI SUR UNE RIVIERE NON DOMANIALE, DE PROUVER QUE LE CANAL DE DECHARGE AVAIT ETE CREE ARTIFICIELLEMENT POUR LE SERVICE DE SON MOULIN, LE LIT D’UN COURS D’EAU, FUT-IL AMENAGE ET UTILISE COMME CANAL DE DECHARGE D’UN MOULIN, N’ETANT PAS, A LA DIFFERENCE DU CANAL CREUSE PAR L’HOMME, PRESUME APPARTENIR EXCLUSIVEMENT AU PROPRIETAIRE DE CE MOULIN. L’ASPECT DU CANAL, SON TRACE SINUEUX, AINSI QUE L’ABSENCE DE TOUTE MENTION DE SON CREUSEMENT DANS LES DOCUMENTS RELATIFS A L’EDIFICATION DU MOULIN SONT DES ELEMENTS SOUVERAINEMENT APPRECIES PAR LA COUR D’APPEL ESTIMANT QUE N’EST PAS RAPPORTEE LA PREUVE DE LA CREATION ARTIFICIELLE DU CANAL LITIGIEUX ET QUE CELUI-CI CONSTITUE UN BRAS NATUREL.

2) EAUX - COURS D’EAU - COURS D’EAU NI NAVIGABLE NI FLOTTABLE - LIT - PROPRIETE - PRESCRIPTION ACQUISITIVE - CONDITION.

LA POSSESSION NE PEUT CONDUIRE UTILEMENT A L’USUCAPION QU’AUTANT QU’ELLE PRESENTE LES CARACTERES PREVUS A L’ARTICLE 2229 DU CODE CIVIL. LA COUR D’APPEL ESTIME SOUVERAINEMENT QUE LA PREUVE N’EST PAS RAPPORTEE DE LA PRESCRIPTION DE LA PROPRIETE DU LIT D’UNE RIVIERE NON DOMANIALE DES LORS QUE LES FAITS DE POSSESSION CONTESTES SONT IMPRECIS, BEAUCOUP TROP LOINTAINS, NE CORRESPONDENT PAS AUX CONSTATATIONS DES EXPERTS ET N’ONT LAISSE AUCUNE TRACE DECISIVE.

Précédents jurisprudentiels : CF. Cour de Cassation (Chambre civile 3) 1972-03-07 Bulletin 1972 III N. 158 P. 114 (REJET) CF. Cour de Cassation (Chambre civile 3) 1972-03-21 Bulletin 1972 III N. 197 (2) P. 139 (REJET)